Histoire de l'amazone Tsedja

"Chaque fois que les minos sortaient du palais, nous étions avec nos clochettes pour leur frayer un passage. Ces femmes étaient mes idoles , elles étaient si vaillantes, si belles… Mon rêve était de devenir l’une d’entre elles. Tout le monde dans le village savait qu’elles étaient sacrées. Leur manquer de respect, c’était perdre la vie! Il ne fallait surtout pas oublier qu’elles appartenaient au roi. J’ai connu un cousin qui avait eu une relation avec l'une d’entre elles: il fut sacrifié devant le roi et tout le village! Quelqu’un dans le village avait découvert leur histoire amoureuse et l’avait dit au roi contre quelques biens. Cette histoire m’avait marqué! Malgré cela, je voulais tout de même intégrer l’armée du roi.

Selon l’un des griots du village, les minos sont apparus avec le règne de Houegbadja. Il a été le roi de 1645 à 1685 et c’est grâce à la reine Tasi Hangbè qui gouvernait de 1708 à 1711, que tout a changé. Elle était elle même une grande combattante. Les guerrières ont officiellement intégré les armées du roi. Elles étaient réparties dans plusieurs groupes. Parmi celles qui faisaient la guerre, il y avait les « agbaraya » qui faisaient partie des armées de tromblons et les « galamentoh », armées de Winchester. Celles qui me faisaient froid dans le dos et qui étaient vives, c’était les achères. Dès qu’elles sentaient un danger à plusieurs mètres, elles lançaient leurs flèches empoisonnées. Celles qui avaient une grande technique c’étaient les «nyckphehthentok», elles étaient chargées de l’abattage.

Je priais chaque jour, les dieux pour un jour intégrer une des armées. Ce jour arriva symbolisé par un pacte de sang pour prouver ma fidélité envers le roi Behanzin. J’étais si heureuse d’avoir été sélectionnée, je voyais la fierté dans les yeux de ma mère qui elle était esclave. Je fais maintenant partie de l’armée, nous étions un peu plus de 5 000 combattantes. J’avais oublié toutes mes douleurs et toutes mes peurs d’auparavant. J’avais maintenant deux choses en tête c’était de combattre pour le roi et avoir la victoire pour le Royaume du Dahomey.

Jour après jour, je voyais à quel point les étrangers cherchaient à contrôler notre peuple. Nous arrivons à leur tenir tête mais une esclave est venue nous dire qu’elle avait entendu une conversation des étrangers. Ils prévoient de nous faire la guerre pour prendre tout ce que nous avons. Ils veulent nous emmener sur leurs terres et nous maltraiter. Je n’ai aucune frayeur face à eux je me battrais jusqu’au sang pour Dahomey. J’arracherais toutes les têtes que je peux jusqu’à ce qu’il n’en reste plus. Cette terre nous appartient et nous allons la conserver. Leurs armes sont si ridicules face à nous. Nous sommes entraînées à les exterminer et je compte le faire. J’attends ce jour patiemment. Les entraînements deviennent de plus en plus intensifs. Nous mangeons beaucoup de viande afin d’être en forme pour les jours à venir.

Un jour de l’année 1890, la Première Guerre du Dahomey éclata et j’étais en tête de rang. Moi, la petite fille qui sonnait l’arrivée des minos avec ma clochette. Arrivée face aux étrangers je ne voulais qu’une chose, voir leur corps sans vies ! Alors avec mon armée nous avons lancé le crie de guerre, pour la première fois de ma vie depuis que je faisais partie des minos, mes peurs avaient ressurgi l’espace de quelques secondes. Je présentais quelque chose de mauvais! C’est en courant vers l’ennemi que j’aperçois une chose énorme qui mettait plusieurs personnes à terre. Je n’avais jamais entendu ce bruit. Mais, je voyais le nombre de morts s’accumulaient de mon côté. J’ai tout de même combattu jusqu'à ce qu’un étranger dirige cette chose vers moi.

À partir de ce moment-là je ne me souviens plus de rien. Peu de temps après, j’aperçois ma soeur sur la terre des étrangers avec ma tenue de guerre. Une chose me trouble car ma soeur n’est pas une mino. Alors, je compris rapidement que ces gens-là cherchaient à imiter ce qu’ils avaient vu sur nos terres avec des filles du Dahomey. Connaissant les minos, ces étrangers n’auraient pas survécu une seconde avec une combattante devant eux.

Je m'appelle Tsedja, j’ai 18 ans et j’ai perdu la vie sur le champ de bataille contre ces français qui ont détruit mon Royaume. Je vous écris d’un autre monde et vous dire à quel point mon coeur saigne. Deux choses règnent en moi la fierté de m’être battu jusqu’au bout et la colère de voir ce qu’il se dit sur mon peuple. C’est mon histoire d’amazone du Royaume de Dahomey."